Affaire Adji Sarr : Le silence troublant et persistant des organisations de femmes

lundi 22 mars 2021 • 1806 lectures • 1 commentaires

Société 3 ans Taille

Affaire Adji Sarr : Le silence troublant et persistant des organisations de femmes

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Les associations de défense des droits de la Femme n’ont jusqu’à présent pas relever le défi devant l’ampleur du scandale dans l’affaire opposant Adji Sarr à Ousmane Sonko.

Adji Sarr n’est pas qu’une épine dans le pied de l’opposant et leader de Pastef Ousmane Sonko. La présumée victime de viols répétitifs est aussi une écharde pour les organisations féminines. Un dard planté en plein dans les idéaux des associations de défense des Droits de la Femme. D’habitude, ces dernières n’hésitent jamais à sortir les griffes et monter au front pour rappeler à la société que la voix de la Femme sénégalaise compte aussi. Ce fut ainsi dans plusieurs affaires. La plus récente, l’étudiante Diary Sow a bénéficié de ce bouclier lorsqu’elle s’est fait ensevelir sous une montagne de harcèlements et d’insultes pour avoir organisé sa disparition. La plus ancienne, Aïssata Tall a mobilisé derrière elle toutes ces organisations lorsqu’il a fallu faire face à son violeur. Parce que la parole de la victime, aussi présumée soit-elle, doit être entendue.
Mais dans cette récente affaire de mœurs, cette nécessité s’est muée en embarras pour celles et ceux qui la défendent. Chaque nouvelle sortie d’Adji Sarr, qu’elle soit indirecte ou directe, est au-delà d’une accusation contre Sonko, une charge contre le silence assourdissant des organisations féminines. Plus la jeune femme parle, plus clairement elle met en exergue le positionnement de ces femmes cloîtrées derrière leur association, institution ou encore l’instruction. Elles ont décidé de ne même pas marquer leur positionnement de principe qui repose, pour presque tous, sur la promotion des droits féminins. Le Protocole de Maputo ou Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, signé par le Sénégal depuis 2004 et sur lequel se base la plupart de ces associations, prévoit pourtant, à l’égard de la Femme, l’élimination de la discrimination, le droit à la dignité ou encore l’élimination des pratiques néfastes. Mais dans cet imbroglio politico-judiciaire où il n’est pas bon de rappeler les principes les plus simples, les réseaux des femmes ont préféré faire profil bas plutôt qu’encourir la colère des réseaux sociaux. Gabrielle Kane et Maïmouna Astou Yade du Collectif pour la protection des femmes et des jeunes filles du Sénégal ont essayé… à leurs dépens. Harcelées, insultées, menacées de mort, elles ont fini par donner une conférence de presse  pour interpeller le ministre de l’Intérieur quant à leur sécurité. «Nous sommes en danger parce qu’on a osé réclamer le droit à la présomption pour Adji Sarr», déclarait Gabrielle Kane. Et dans leur désarroi, peu de leurs consœurs activistes leur ont témoigné du soutien. Pis, le Collectif s’était heurté à un mur lorsqu’elle avait publié, le 9 février, un manifeste pour recentrer le débat et fustiger le déséquilibre dans le traitement. «Nous avons malheureusement constaté que l’attention est plus tournée vers la présumée victime, et que des tentatives de décrédibilisation de sa parole vont même jusqu’à porter atteinte à sa dignité.» 
La présidente du Réseau Siggil Jiggéen, Safiètou Diop, n’avait pas hésité à contre-attaquer pour se démarquer de ce positionnement. «Le Réseau qui mène un combat d’avant-garde pour les droits des femmes (…) tient à informer l’opinion publique nationale que ses 18 organisations membres ne sont en aucun cas concernées, ni de près ni de loin, par ce communiqué», écrivait-elle. Une démarcation qui n’avait pas empêché le Réseau de s’accoquiner avec la ministre Zahra Iyane Thiam et la coordonnatrice de plusieurs plateformes et mouvements pour la démocratie, Fatou Blondin Diop, pour signer un accord d’armistice dans des manifestations où elles ne sont pas censées être actrices. Mercredi, la sortie d’Adji Sarr a provoqué un autre torrent d’insultes, menaces, harcèlements et propos discriminatoires à l’égard de la victime présumée. Ni le Réseau Siggil Jigéen, ni l’Observatoire nationale de la parité, ni la Synergie pour l’élimination des violences basées sur le genre ne se sont émus. Difficiles même de les joindre au téléphone et même lorsque Penda Seck, présidente de la Synergie, finit pas décrocher, elle fait semblant de ne pas comprendre les questions pour raccrocher au plus vite. A défaut d’organisations dédiées, de simples citoyen(ne)s ont pris la relève juste dans un hashtag #BelieveSurvivors pour faire entendre leurs voix : «A toutes les survivantes/victimes de viol, nous vous croyons.»
AICHA FALL

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Publié par

Namory BARRY

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