Chine -  L'enfer continu des étudiants de Wuhan, 12 mois après

vendredi 20 novembre 2020 • 213 lectures • 1 commentaires

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Chine -  L\'enfer continu des étudiants de Wuhan, 12 mois après

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Ils ne sont pas encore au bout de leur peine. Même si la maladie à Coronavirus a été presque maîtrisée en Chine, les 13 étudiants Sénégalais de Wuhan, dont la situation désespérée au début de la pandémie avait ému tout le pays, sont toujours enfermés dans leurs universités avec un contrôle strict.

Il y a un an, la Chine comptait ses premiers malades du coronavirus. Les cris de détresse sont provenus de Wuhan, épicentre de la maladie. Dans la capitale de la province du Hubei, située en Chine centrale, 11 millions d’âmes sont confinées en janvier 2020. Dans le lot, 13 étudiants Sénégalais appellent désespérément au secours. Ils veulent être rapatriés pour échapper à la furie meurtrière du virus. Face à leur souhait, Macky Sall est catégorique : le Sénégal n’a pas les moyens de les rapatrier. Un coup de massue ! Les étudiants sont désemparés, livrés à eux-mêmes face à une mort annoncée. C’est l’émoi et la confusion. 365 jours sont passés et la ville de Wuhan - qui a enregistré, à la date d’hier jeudi, 50 340 cas de coronavirus, dont 46 471 guérisons et 3 869 décès - panse ses plaies et se débat entre le désir de revivre normalement et l’angoisse d’une situation économique pas des meilleures. La Chine se remet peu à peu. Encore confinés dans les campus universitaires, les étudiants sénégalais de Wuhan, qui n’ont pas enregistré de cas jusque-là, subissent toujours les effets pervers de la pandémie.

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«Comme dans une prison à ciel ouvert»

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André Tine est le président de l’association des étudiants Sénégalais de Chine. Il donne des nouvelles de ses amis. «Les étudiants de Wuhan sont là. Ils vont bien, même si certains n’ont pas le droit de sortir de leur université ou pour sortir, il leur faut faire une demande exceptionnelle. La plupart ont pris l’habitude d’être enfermés, mais ça ne doit pas être facile pour des personnes de rester une année enfermée dans un campus, de ne pas vaquer librement à leurs occupations. C’est comme s’ils étaient dans une prison à ciel ouvert.» Surtout que leur calvaire dure depuis leur appel de désespoir à l’endroit de l’Etat du Sénégal. Leur situation est presque connue de tous en Chine. Younouss Coulibaly est aussi un étudiant au pays de Mao Zedong. Il confesse : «La situation est presque revenue à la normale. Il n’y a qu’une difficulté, ce sont les étudiants qui sont enfermés dans les universités. Ils n’ont pas une liberté à 100/100. Ils n’ont pas la latitude d’aller et de venir comme ils le souhaitent. Le contrôle est strict. Les entrées et sorties sont réglementées. Et pour sortir, il faut au préalable demander une autorisation. Les températures sont toujours vérifiées. Dans les centres commerciaux, les lieux publics, les transports les masques sont toujours exigés. Une vérification d’identité est faite tous les jours, la carte d’étudiant est demandée ou on te donne un code pour la traçabilité. Les cours se faisaient en ligne, mais ils ont repris depuis septembre en présentiel. Il n’y a aucun problème. Il y a des universités qui n’admettent pas de visites, seuls leurs étudiants sont autorisés d’accès.» Cette mesure n’est pas seulement infligée aux étudiants Sénégalais. «C’est dans toute la Chine que des étudiants étrangers sont enfermés dans leur université. Les autorités chinoises ne veulent prendre aucun risque. La vie a repris son cours normal. Il y a seulement quelques cas dans certaines zones de Covid-19. C’est une quantité négligeable. Les gens vaquent à leurs occupations. Les étudiants vont en classe aussi bien les Chinois que les Sénégalais.» 


«Impossibilité de renouveler leur passeport»


A côté de cette contrainte, il y a aussi des problèmes de papiers qui, au delà des étudiants, touchent une bonne partie des Sénégalais établis en Chine. «Les étudiants de Wuhan vont bien, mais c’est dur de rester sans activités et ils y sont presque contraints. Certains étudiants et autres businessmen demandent depuis lors au gouvernement d’envoyer des gens pour leur confectionner des passeports. Ceux qui n’ont pas de carte de résident se rendaient chaque fin du mois, à Macao, une petite ville sur la côte du sud-est de la Chine, pour au moins sortir de leur ville de résidence, mais avec le Covid-19, c’est impossible. Ils sont obligés de rester et chaque mois, ils vont au service d’immigration pour un autre visa. Mais, le problème c’est qu’avec ça, ils n’ont plus de pages disponibles sur leur passeport. Le problème perdure et beaucoup de gens ne sont plus en règle», se désole Serigne Mbaye, vice-président de l’association des Sénégalais de Chine. Même si les autorités sénégalaises ont été saisies, rien n’est encore fait, ou du moins Serigne Mbaye n’en a pas encore connaissance. «Ils allaient à Macao pour pouvoir utiliser le visa d’un an qu’ils avaient, mais ce n’est plus possible. Ils sont obligés d’aller au service de l’immigration pour une régularisation d’un mois. Il n’y a plus de pages pour tamponner les visas et le gouvernement chinois les renvoie toujours aux autorités sénégalaises. C’est très difficile. A Guangzhou, nous avons un consulat que nous avons déjà saisi et rien n’est encore fait. Il y a des passeports qui ont expiré.»


«Les universités ne vont pas prendre le risque de les garder»


Pour les étudiants, explique Serigne Mbaye, s’ils sont dans l’impossibilité  de renouveler leur passeport, c’est parce que le passeport en vigueur doit dater de six mois et cela n’est plus le cas pour beaucoup d’entre eux. «Ils peuvent avoir des problèmes avec leurs universités, assure Serigne Mbaye. Quand ils ne sont plus en règle, les universités ne vont pas prendre le risque de les garder. L’Etat doit vraiment réagir.» Si Serigne Mbaye insiste autant, c’est que le Coronavirus a laissé des séquelles énormes. Aussi bien psychiques que physiques. «C’était une catastrophe très difficile à vivre pour la communauté africaine parce que les Chinois pensaient que les Africains étaient coupables de la situation, raconte Serigne Mbaye. C’était une situation lourde de conséquences. Les Africains étaient arrêtés et placés en quarantaine. Ils n’avaient aucune liberté pour vaquer à leurs occupations. Heureusement qu’aucun Sénégalais n’a été infecté. Mais, les étudiants et les travailleurs y rencontrent des difficultés. Certains faisaient leurs cours en ligne. Pour les businessmen, à cause de la fermeture des frontières, ils n’arrivent plus à s’en sortir parce qu’il n’y a plus de trafic. C’est difficile de tenir économiquement. Il y a énormément de dépenses et sans retour. Les activités n’ont pas vraiment repris.» 


Les choses vont certes au ralenti, mais André Tine reste optimiste. «Il n’y a plus cette peur du début, confie-t-il. C’est un peu comme au Sénégal. Ici, les gens sont disciplinés et ils respectent les règles. Les gens sont en alerte. Ceux qui ont des soucis, ce sont les gens qui ont une bourse cette année et qui n’ont pas la possibilité de venir en Chine parce qu’elle a fermé ses frontières aux étudiants étrangers. Ils ne savent pas quand ils vont venir en Chine et d’autres sont en train de faire des cours en ligne et le faire dans une langue qui n’est pas familière, c’est un peu délicat. A part ça, tout va bien, le seul souci, ce sont les étudiants enfermés dans les universités.» Une situation inconfortable, mais s’adapter semble la seule issue.


«Nous avions besoin de sécurité»


Younouss Coulibaly en est conscient. «Nous nous sommes adaptés à la nouvelle situation et heureusement, aucun étudiant n’a été infecté. Il n’y a plus de psychose. Nous rendons grâce à Dieu. Notre ambassade de Beijing nous assiste depuis le début, pas plus tard que dimanche dernier, il nous a envoyé une délégation pour s’enquérir de notre situation. Nous avons parlé de beaucoup de choses», révèle-t-il. Plongé dans ses souvenirs, il se rappelle ses journées noires, longues et interminables. «Je restais une dizaine de jours dans ma chambre sans voir personne. Je restais enfermé pendant très longtemps, en me demandant si je mourrais ou pas de la maladie. Je n’osais pas mettre les pieds hors de ma chambre. C’était une situation inédite, infernale. Le nombre de contaminés et de décès par jour n’arrangeait pas les choses. On se disait que cela pouvait nous tomber dessus à tout moment. Il y avait un déficit de denrées alimentaires dans les supermarchés et une flambée des prix. L’Etat nous avait donné de l’argent, mais en cette période, nous n’avions pas un besoin financier, nous n’avions pas de soucis d’argent, nous avions besoin de sécurité. Nous avions même des problèmes pour dépenser l’argent. Ce n’était pas notre priorité. Mais maintenant ça va, grâce à Dieu.» Le Tout-Puissant.


MOÏSE SARR , SECRETAIRE D’ETAT AUX SENEGALAIS DE L’EXTERIEUR : «Nous avons saisi les autorités compétentes»


«Au delà des actes et des papiers en termes de séjour, c’est la mobilité internationale qui a été suspendue. Tout ce qui est administration pour beaucoup de pays a été fermé. La Chine est dans une situation difficile jusqu’à présent. Ce n’est pas uniquement la Chine, nous travaillons sur neuf pays. Nous avons saisi les autorités compétentes. Nous avons introduit des demandes parce que quand une mission doit partir d’ici, l’Ambassade délivre des visas. Il faut aussi que dans le pays d’accueil où résident nos compatriotes qu’on autorise certains rassemblements. En Espagne, par exemple, on ne peut pas accepter un rassemblement de plus de dix personnes. En Italie, ils assurent le service minimum. C’est la même situation à Paris où le nombre de dossiers traités par jour est passé de 150 à moins de 40. C’est le contexte mondial. Aujourd’hui, toutes les administrations sont dans cette situation, mais elles traitent ces cas avec beaucoup de compréhension en termes de carte de séjour, de renouvellement parce que l’administration ne peut pas se prévaloir de sa propre turpitude. La faute n’incombe pas forcément aux usagers, mais plutôt à l’administration. A situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Qu’on veuille nous incriminer, on comprend. Mais nous sommes aussi dans le réel. Les actions ont été engagées depuis longtemps, des saisines ont été faites et nous y travaillons.»


CODOU BADIANE

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Publié par

Namory BARRY

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