Discours du 3 avril : Macky Sall, les enjeux d’un discours et les attentes du peuple…

samedi 3 avril 2021 • 976 lectures • 1 commentaires

Politique 2 ans Taille

Discours du 3 avril : Macky Sall, les enjeux d’un discours et les attentes du peuple…

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C’est à 20 heures, ce samedi 03 avril 2021, veille de célébration de la 61ème Fête de l’indépendance, que le président de la République, Macky Sall, va s’adresser à la nation sénégalaise. En cette période post-crise, quelle devrait être la teneur de son discours ? Sur quoi devrait-il axer son speech pour ressusciter un brin d’espoir chez les jeunes hantés par le chômage et l’oisiveté ? Après analyse des derniers évènements qui son secoué le pays, Macky devrait-il redéfinir sa politique gouvernementale ?

Les analystes politiques ont «plongé» dans la tête de Macky Sall.

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C’est un exercice auquel il est habitué. Ce sera la 10ème fois qu’il sacrifie à ce «rituel» symbolique. Mais, cette fois-ci, le contexte est tout autre. Voire particulier. L’adresse à la nation du 03 avril 2021, veille de la 61ème célébration de la fête d’indépendance du Sénégal, se passe dans un contexte post-crise. Une crise politico-social née de l’affaire de présumés viols répétitifs et menaces de morts du leader des Patriotes du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité (Pastef) Ousmane Sonko sur la jeune masseuse Adji Sarr. Une affaire de mœurs qui avait occasionné des manifestations ayant fait une dizaine de morts et des dégâts matériels énormes entre les 4 et 8 mars 2021. Ces émeutes avaient poussé le chef de l’Etat à s’adresser à la Nation et annoncer une enveloppe de 350 milliards FCfa pour assister les jeunes qui déversé leur colère dans la rue. Cette situation de crise. Aujourd’ui, les attentes sont énormes et l’espoir grand. Le Président Macky Sall est attendu sur toutes les questions qui touchent la vie sociale et économique du pays. La solennité du moment requiert donc du tact et de la tactique. Du savoir et du savoir-faire. 
La piqûre de rappel du chef de l’Etat qui a favorisé un léger dégel du front social, n’a guère apaisé la soif de «changement» du peuple sénégalais qui demeure (encore) insatiable. Donc quel devrait être la teneur de son discours de ce samedi, veille de célébration de l’accession de notre pays à la souveraineté internationale ? Momar Thiam,  Docteur en communication et marketing politique, n’y va pas avec le dos de la cuillère : «Dans son discours, le président de la République devra rétablir la confiance entre l’Exécutif et les Sénégalais, compte tenu de tout ce qui s’est passé et qui a créé des ruptures et un état de choc ainsi que des dysfonctionnements autour du domaine social. Quand des évènements de ce type se produisent, le Président doit prendre la mesure des enjeux et être dans la communication et les actes. Il devrait donc s’inscrire dans un discours d’apaisement. Parce que le choc que les évènements ont créé avec des dizaines de morts, est sans précédent. Mais aussi parce que le champ politique est en ébullition avec l’opposition qui se radicalise de plus en plus». C’était le jeudi 1er avril 2021. Le Fnr (Front national de résistance) représentant une frange importante de l’opposition claquait la porte de la commission politique du dialogue national. Une sortie qui risque de précipiter la «mort» de ladite commission et réveiller les vieux démons des antagonismes politiques. Mais le Président Macky Sall peut toujours sauver les meubles. «Son expression : ‘’je vais réduire l’opposition à sa plus simple expression’’ est une manière de dire que je vais étouffer l’opposition et qui étouffe l’opposition, étouffe aussi une certaine forme de respiration démocratique. Il devrait chercher à apaiser ses relations avec une frange de l’opposition et même baisser dès fois la garde. Ce qui n’est pas une faiblesse, mais c’est tenir compte de ceux qui n’ont pas voté pour vous et qui sont dans une démarche constructive», conseille le Dr Momar Thiam. Et pour l’enseignant-chercheur en Sciences politiques à l’Ugb, Dr Moussa Diaw, le Président Sall devrait accès son discours sur «l’apaisement et certainement fixer la date des élections locales. Pour montrer sa détermination à poursuivre le dialogue politique, tout en faisant des annonces pour la jeunesse».
Désœuvrés et hantée par le chômage et la perte le manque d’emploi accentués par les effets du Covid-19, des milliers de jeunes sénégalais ont manifesté courant mars 2021 pour de meilleures conditions de vie. Mais qu’est-ce que le chef de l’Etat pourrait dire pour ressusciter l’espoir chez ces jeunes ? Dr Momar Thiam : «Pour rétablir la confiance entre les Sénégalais et l’Exécutif, le Président doit s’attaquer aux véritables problèmes endémiques, comme l’emploi, la santé et l’éducation. Le pouvoir ne peut pas donner de l’emploi aux jeunes mais doit créer les conditions pour donner de l’emploi. Le Président devrait être assez éclairé d’abréger toutes les structures qui tournent autour de l’emploi des jeunes autour d’une grande structure pilotée depuis la Primature ou la Présidence, avec des personnes qui ont fait leurs preuves dans le domaine de l’entreprenariat ou de la recherche et de la prospective». Le Dr Moussa Diaw est du même avis. Ou presque. Pour lui, il urge même de convoquer des «Assises de la jeunesse». Ce qui permettra d’identifier tous les problèmes d’emplois et éventuellement apporter des solutions. Il déroule : «Il faut que la jeunesse ne soit pas partisane mais une jeunesse inclusive et englobant l’ensemble des jeunes et citoyens à la recherche d’emploi ou de formation. Le Président devra penser à des réformes institutionnelles par rapport à la justice et donner des gages pour la liberté d’expression et assurer une sécurité à l’ensemble des acteurs politiques». 

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Dissolution du gouvernement, retour du poste de Pm, ces mesures phares attendues du Président
Au-delà des questions sociales et économiques, le Président Macky Sall devrait «redéfinir» sa politique gouvernementale, selon Dr Moussa Diaw. «Mais est-ce qu’il est dans cette logique-là ? s’interroge-t-il. C’est l’occasion pour lui de clarifier le jeu politique. C’est-à-dire expliquer aux citoyens qu’il termine son mandat et part. A partir de ce moment-là, il va marquer historiquement son passage à la tête du pays et pourrait éventuellement gagner la confiance des Sénégalais. Il doit s’écarter de la politique politicienne avec des méga meetings et être dans le temps de l’action et non des discours». Momar Thiam poursuit : «Le Président devrait changer sa ligne directrice en termes de gestion de la chose publique pour dire à ses ministres de s’atteler à la tâche et qu’il préfère les voir à l’œuvre dans les différents dossiers et projets en cours que de les voir faire des meetings à coups de millions». Mieux, ajoute Momar Thiam, «l’acte fort que le Président doit poser, c’est la dissolution du gouvernement. A partir du moment où il n’y a plus de confiance entre les populations et ceux qui sont chargés de gérer la chose publique, le président de la République est en droit de créer un électrochoc en mettant en place une dissolution du gouvernement et en créant un lien neutre. Ce n’est pas uniquement apporter des hommes et femmes neufs, mais c’est apporter des hommes et femmes qui sont à la dimension des enjeux et reconnus pour leur expertise et compétence». Toujours dans les transmutations attendues, il faudra, selon Momar, rétablir le poste de premier ministre. Ce qui ne va pas empêcher au Président de rester toujours maître du jeu. «Cela permettrait, dit-il, aussi de déplacer le curseur du troisième mandat vers le curseur du dauphinat. Parce que pour un mandat qui est en fin de mission, un Pm est toujours considéré comme un dauphin potentiel. Cela permettrait aussi d’adoucir tout le discours d’opposition et de la société civile autour de la question du troisième mandat». 


ME ROBERT BOURGI, AVOCAT ET ANALYSTE POLITIQUE : «Les sénégalais, dans leur majorité, veulent des visages nouveaux, des hommes qu’ils aiment et qui ont fait leurs preuves»


Avocat et analyste politique, Robert Bourgi estime que le Président Sall qui a entendu et saisi le cri de désespoir et le ras-bol de la jeunesse sénégalaise, devrait être entouré de visages nouveaux et d’hommes qui ont fait leurs preuves.


Le Président Sall devra prononcer son adresse à la Nation du 3 avril dans un contexte post-crise. Quel devrait être la teneur de son discours ?
Après les tragiques et tristes événements des semaines passées qui ont pratiquement mis en danger la République, le président de la République doit tenir un discours rassembleur. Sauvegarder l’unité et la paix dans le pays ont toujours été ses thèmes de prédilection. Seulement, il est indéniable que le président de la République n’a pas été suivi, comme il fallait qu’il le soit, par toutes les composantes de l’Exécutif et du Législatif. Le Président a su garder son sang-froid et passer au tamis de sa conscience. D’abord, la réalité des maux dont souffrait le pays, et ensuite, les choix qu’il lui fallait faire pour redonner un espoir au pays. Le mouvement général du monde devrait conduire le Président à modifier, voire bouleverser l’ordre politique sénégalais qui existe sans changement notable depuis des décennies. Je crois profondément dans les qualités de visionnaire du chef de l’Etat. Le Président sait, entend et observe tout ce qui va et tout ce qui ne va pas. Ce n’est pas un homme qui réagit à chaud, il prend le temps de la réflexion et il a entendu et saisi le cri de désespoir et le ras-bol de la jeunesse sénégalaise. Le paysage politique n’a guère changé depuis si longtemps que l’on peut parler de fossilisation des responsables politiques. Au cours de ces événements, maints responsables ont fait preuve de légèreté dans leurs comportements et dans leurs dires. Le Président saura trancher un peu plus tôt, un peu plus tard. Il est vrai que les chefs religieux ont contribué au retour de la paix, mais il est indéniable que le Président a pesé lourd pour l’élargissement de certains détenus politiques.
D’après vous, que devrait-il dire pour ressusciter l’espoir perdu chez certains jeunes qui ont manifesté dernièrement et quels actes forts devrait-il poser ce 3 avril ?
La population sénégalaise est composée à 70% de jeunes. Oui, on a cassé, brûlé et provoqué des dommages contre les biens et les intérêts sénégalais et étrangers, mais si tout cela est regrettable, les fauteurs de troubles, les casseurs ne sont ni terroristes ni putschistes. Les jeunes veulent du travail. Ils veulent sortir du chômage, être formés et avoir des emplois. Ils veulent étudier dans les meilleures conditions et sortir de l’enfer du chômage et du désœuvrement. Que cette jeunesse qui s’est révoltée, fasse confiance au Président, qui n’est pas homme de mensonge et de tromperie. Sa porte est ouverte, c’est un homme de dialogue, ouvert et tourné vers les intérêts du peuple sénégalais. Il a déjà pris des mesures pour améliorer le sort de cette jeunesse qui veut contribuer à l’activité économique et au développement du pays. Oui, le pétrole et le gaz sont source de revenus considérables pour le pays. Le Président saura en faire le meilleur usage. Il sait quel pays il dirige et quel héritage il doit entretenir et enrichir. L’histoire du Sénégal est riche de son passé et avec Macky Sall, le pays sera plus riche de son avenir. Que cette jeunesse lui fasse confiance, lui parle et dialogue avec lui, sans chercher à lui imposer des diktats.


Au delà de la prise en compte des questions sociales et économiques, le Président ne devrait-il pas redéfinir sa ligne politique, après analyse des derniers évènements et de la molle réaction de ses hommes ?
La fossilisation regrettable de la vie politique sénégalaise devrait conduire le président de la République à se tourner un peu plus vers la société civile et y puiser ceux qui l’aideront dans sa tâche et dans sa volonté de gouverner le pays au mieux des intérêts des Sénégalais. Le Sénégal est riche de ses intellectuels de premier ordre. Qu’il fasse appel à eux, chacun dans sa spécificité. Technocrates oui, mais hommes de valeurs et pas des apparatchiks. Les Sénégalais, dans leur majorité, veulent des visages nouveaux, des hommes qu’ils aiment et qui ont fait leurs preuves. Il lui faut s’entourer d’hommes et de femmes compétents et dévoués à sa personne et à la cause publique. Peut-être, à la lumière des derniers événements, lui faudra-t-il revenir à l’instauration à ses côtés d’un Premier ministre, chargé de coordonner l’action gouvernementale. Constat a été fait qu’il fut trop seul dans la tourmente. Son savoir-faire, son calme, sa modération, sa sagesse et sa détermination ont sauvé la République.
IBRAHIMA KANDE

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Publié par

Namory BARRY

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