Immersion dans la vie des Haoussas et Yoroubas établis à Médina Baye

lundi 18 octobre 2021 • 1488 lectures • 1 commentaires

Société 2 ans Taille

Immersion dans la vie des Haoussas et Yoroubas établis à Médina Baye

PUBLICITÉ

Nigérians d’origine pour la plupart, ils sont des centaines de Haoussas et de Yorubas venus s’installer depuis des années à Médina Baye, cité religieuse fondée par leur guide spirituel, Cheikh Ibrahima Niass, pour y passer le restant de leur vie. Au cœur de la ferveur soufie, ces migrants de la foi, adeptes de «Baye», se sont fondus dans la masse et épousés les normes sociales de cette ville à laquelle ils vouent leur salut.

Au portail de la Grande Mosquée de Médina Baye, quelques instants après les dernières invocations de l’Imam, Hassan Harouna s’extrait d’une foule compacte, le chapelet enroulé autour du poignet droit. Âgée d’une vingtaine d’années et revêtu d’une sobre djellaba, il marque quelques pas avant de croiser un de ses concitoyens, venu, comme lui, poursuivre sa destinée dans la ville de son guide spirituel. A l’évocation du nom de Baye Niass, l’échange est vite abrégé entre les deux Nigérians. Sourire aux lèvres, le visage radieux, Harouna retrace les péripéties de son aventure. «C’est dans mon pays que j’ai été initié au ‘’Tarbiya’’ sous la direction de Cheikh Bachir, un Nigérian, ‘’Moukhadam’’ de Baye Niass. Puis en 2019, j’ai décidé de venir m’installer à Médina Baye pour parfaire mes connaissances avant de trouver un emploi sur place», raconte-t-il avant de se rendre dans son petit commerce niché dans les parages de la mosquée. A l’image de Haruna, Abubakar Taib, 42 ans, s’est engagé dans le même périple. En 2017, la foi en bandoulière, l’horizon fixé, cet Haoussa quitte sa ville natale de Tahoua, une région du Niger, dans le but de s’implanter à Médina Baye. Comme bon nombre de disciples trouvés sur les lieux, ce migrant de la foi s’emploie à la gestion de ce temple religieux fondé par Cheikh Ibrahima Niass.
En cet après-midi caniculaire, dans un coin de la cour de la mosquée, assis sur une natte les pieds joints, la barbe taillée avec minutie, Abubakar devise en groupe autour des préparatifs du Gamou. Présentations faites, il reçoit avec sollicitude. D’un ton solennel, le bonnet haoussa trônant religieusement sur la tête, il prend la parole : «Dès les premiers jours de ma vie dans le soufisme par la voie du Cheikh Al Islam, j’ai compris que ma vie doit se faire dans la cité religieuse de Médina Baye. C’est ainsi que j’ai décidé d’abandonner pour me lancer sur le chemin de Kaolack. Et arrivé sur place, après un si long trajet, à ma grande surprise, je me vois accueillir et héberger par Imam Cissé.»

PUBLICITÉ


Shékina, une Yoruba, épouse de Pape Niass, l’Imam de Taïba Niassène
Au bout d’une ruelle jouxtant la Grande Mosquée, Shékina Niass, moulée dans un «meulfeu» beige, sert le thé à la devanture de sa demeure. Venue de Lagos à l’âge de 18 ans, Shékina a vu ses racines Yoruba se fixer au cœur de Kaolack à travers son union avec Pape Ibrahima Niass, Imam de la mosquée de Taïba Niassène et petit-fils de Baye. D’une tasse qu’elle pose soigneusement sur les mains de son époux et ses incessantes tâches ménagères, son wolof témoigne de son ancrage dans cette ville religieuse. «C’est vrai qu’au regard de la dimension internationale de la Faydou Tidjiani, tous les peuples regorgent de disciples de Cheikh Ibrahima Niass. Cependant, j’ose affirmer sans me tromper que nous, les Yorubas, sommes ses plus grands adeptes. J’ai passé presque toute ma vie à Médina Baye. Et je prie également Dieu de m’accorder l’honneur d’y vivre le restant de mes jours auprès de mon guide, de mon époux et de ma progéniture», confie Shékina Niass, debout, le regard pointé dans le vide.
Imposant bâtiment, la concession de Pape Cheikh Niass, défunt Khalife de Médina Baye, fait office de principal foyer abritant des dizaines de familles de Nigérians installées dans la localité depuis des années. Au premier étage, arpentant le long d'un couloir, il y a l'appartement occupé par Mouhamadine, un Yoruba autrefois chambellan et bras droit du troisième Khalife de Cheikh Ibrahima Niass. Selon lui, plus de 150 Nigérians vivent dans cette demeure. «C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ici, à Médina Baye, cette concession est qualifiée de foyer des Haoussas et Yorubas. Ce qui est compréhensible dans la mesure où, en plus de ma femme et de mes enfants, je vis ici avec 12 de mes frères, tous venant du Nigeria», comptabilise Mouhamadine, entouré de sa fratrie.
 
Mohamed Gaaly, un Haoussa héritier des clés de la chambre de Baye Niass
39 ans, marié et père de trois enfants, Mohamed Gaaly, un disciple Haoussa, a hérité de la garde des clés de la chambre de Cheikh Ibrahima Niass. Sur les lieux, en fraction, il s’y emploie avec vénération au beau milieu des fidèles venus se recueillir. Au cœur de cette ferveur, Gaaly trouve le temps de revenir sur son odyssée : «Je suis originaire de la région de Kumasi, au Sud du Ghana, où j’ai fait mes études. Et c’est à l’âge de 19 ans que je suis venu poursuivre mon cursus dans cette ville de Médina Baye. C’était en 2001, sous le Khalifat de Cheikh Ahmad Dame Niass, troisième Khalife de Cheikh Ibrahima Niass. Cependant, déjà en 1961, une de mes sœurs s’était établie à Médina Baye et était mariée à un autre Haoussa, chargé de veiller sur ce patrimoine religieux. Le maître des lieux d’alors, ayant senti le poids de l’âge, me conduit chez le Khalife, Cheikh Ahmad Dame Niass. C’est ce dernier qui m’a confié les clés de cette chambre de Baye Niass en me disant qu’il remettait entre mes mains, un des trésors les plus symboliques de la cité fondée par Cheikh Al Islam. Depuis lors, je m’efforce à veiller scrupuleusement à cette chambre.» Porte-parole de la communauté Haoussa établie à Medina Baye, il ajoute que, depuis 1930, des Haoussas qui ont fait allégeance à Cheikh Ibrahima Niass, ont migré pour venir s’installer à Médina Baye. «Et il faut dire que cette tradition s’est accentuée au fil des années et, de génération en génération, elle se perpétue. Aujourd’hui, nous sommes des centaines de Haoussas et de Yorubas à vivre dans cette ville religieuse où nous formons une forte communauté qui, avec les interactions sociales, s’est carrément intégrée», témoigne Mohamed Gaaly.
FALILOU MBALLO

PUBLICITÉ

Cet article a été ouvert 1488 fois.

Publié par

Namory BARRY

admin

1 Commentaires

Je m'appelle

Téléchargez notre application sur iOS et Android

Contactez-nous !

Ndiaga Ndiaye

Directeur de publication

Service commercial