Macky Sall et les graves mécomptes de la Cour des comptes

samedi 28 novembre 2020 • 358 lectures • 1 commentaires

Politique 3 ans Taille

Macky Sall et les graves mécomptes de la Cour des comptes

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Malgré les promesses du chef de l’Etat, aucun suivi des recommandations des rapports 2015-2017 n’a été jusque-là constaté. Et le retard noté dans la publication des rapports (2018-2019) de la Cour des comptes prévue au plus tard, fin octobre dernier, n’est pas du goût de la Société civile sénégalaise, qui exige des poursuites judiciaires contre les personnalités épinglées en février dernier.

C’était une promesse électorale adossée à un slogan de campagne. En combattant Abdoulaye Wade, son mentor politique, dont la fin de règne, en 2012, était assombrie par une nuée de «cafards» sortis des tiroirs de la République infestant la rue publique, Macky Sall avait promis aux Sénégalais une «gouvernance sobre et vertueuse». Une gestion équitable et non partisane des affaires publiques. «Je ne protégerai personne», répétait-il, après son accession à la magistrature suprême qui avait été suivie par la sortie des rapports de l’Inspection générale d’Etat épinglant d’anciens pontes du régime libéral avec qui, il a fait les beaux jours du Parti démocratique sénégalais. Entre-temps, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts politiques et le chef de l’Etat a avoué même avoir mis son coude sur certains dossiers, dont celui du Festival mondial des arts nègres (Fesman, 2010) concernant la fille de l’ancien chef de l’Etat, Me Wade. Une déclaration qui avait mis le pays sens dessus-dessous et poussé beaucoup de Sénégalais à se poser des questions sur les réelles volontés de Macky Sall de faire régner la Justice au Sénégal. 

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Samedi 1er février 2019,  rebelote ! Dans un travail «méticuleux», la Cour des comptes, qui était restée muette durant quelques années, publie dans ses rapports 2015, 2016 et 2017 des «irrégularités financières» au sommet de l’Etat et dévoile les mille visages des «pilleurs» à col blanc. Et c’est au total, quelque 50 entités publiques du pays qui ont été «épinglées» par la première juridiction des finances publiques du Sénégal. La Caisse des dépôts et de consignations, le Port autonome de Dakar, le Centre des œuvres universitaires de Dakar, le Centre international du commerce extérieur du Sénégal, le Plan national d'organisation des secours, l’Office des forages ruraux, Agence sénégalaise d'électrification rurale ont été, entre autres, tous «mouillés» par les rapports Cour des comptes. Ce travail élaboré par Mamadou Faye et ses camarades a soulevé une vague d’indignation et suscité un tollé de réactions. Les unes plus virulentes que les autres. «Nous espérons que cette fois, il y aura une suite judiciaire à tout cela», réclament, en chœur, les Sénégalais. «En conformité avec les décisions de l’Union africaine, il faudrait que les rapports qui sont déposés par la Cour des comptes, fassent l’objet de suivi au niveau de la Justice. On ne dit pas que telle ou telle personne doit être condamnée, mais que la justice se saisisse de la question et traite les rapports des corps de contrôle de l’Etat, comme celui de la Cour des comptes», fait savoir le coordonnateur du Forum Civil, Birahim Seck.

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«Le Président se sert des rapports pour exercer une vengeance»


Pour calmer le jeu, le Président Macky Sall avait, en Conseil des ministres, annoncé la mise en place d’une Commission chargée du suivi et de la mise en œuvre des recommandations de la Cour des comptes. Mais 10 mois après l’annonce, où en est-on réellement ? Ladite commission a-t-elle été installée ? Si oui, y-a-t-il eu un suivi des recommandations de la Cour des comptes ? «Jusque-là, on est resté à l’état des déclarations officielles. Rien de concret n’a été véritablement posé», souffle une source officielle. Mais pour le chef de file du mouvement anti-impérialiste populaire et panafricain Frapp-France Dégage, Guy Marius Sagna, cette situation était prévisible. Puisque, explique-t-il, l’annonce du chef de l’Etat n’avait qu’une seule visée : «éteindre le feu de la révolte populaire». «Le président est un élève de Clémenceau (cet homme politique français disait que pour mieux échapper à un problème et casser une préoccupation du peuple, il faut créer une commission, Ndlr) qui, à chaque fois qu’il veut noyer un problème ou faire disparaître un débat, dit qu’il va créer une commission ou une institution», déplore la tête de gondole de Frapp. Pour Guy Marius Sagna, les rapports (2015, 2016, 2017) de la Cour des comptes, au lieu de permettre une reddition des comptes, ont servi à Macky Sall de «liquider» des adversaires politiques. Il explique : «Les rapports des corps de contrôle de l’Etat n’ont servi qu’à une seule chose à Macky Sall, c’est d’exercer une vengeance et un règlement de comptes politiques. Ils lui ont juste servi à se débarrasser des adversaires encombrants et à imposer aux autres adversaires de venir le rallier. Beaucoup de gens de sa majorité présidentielle n’ont pu le rejoindre qu’à coups de menaces basées sur ces rapports. La redevabilité n’a jamais été une préoccupation fondamentale et prioritaire du président. Sa préoccupation, c’est de faire des règlements de compte et non de rendre des comptes. Et le règlement de comptes ne peut être un programme de bonne gouvernance, mais c’est un programme pour ligoter des adversaires politiques insoumis». Comme ce fut le cas, souligne Guy Marius Sagna, pour l’ancien édile dakarois, Khalifa Sall. Epinglé par l’Inspection générale d’Etat (Ige) dans le cadre de la Caisse d’Avance de la mairie de Dakar, le patron de la coalition «Taxawu Ndakaru» a été reconnu coupable des délits «d’escroquerie aux deniers publics», «faux et usage de faux dans des documents administratifs» et de «complicité en faux en écriture de commerce», il sera condamné à 5 ans de prison ferme, assortie d’une amende pénale de 5 millions francs Cfa.


«La promesse manquée du premier président de la Cour des comptes»


A côté des promesses du chef de l’Etat, figure une autre faite par le premier président de la Cour des comptes, Mamadou Faye. En conférence de presse au mois de février dernier, le magistrat dénonçait le manque d’effectif qui minait l’institution. Dans la foulée, Mamadou Faye avait annoncé que «des «mesures fortes ont été prises pour assurer plus de régularité à la production de rapports de «haute qualité et dans les délais». À ce propos, il avait promis la publication des rapports 2018 et 2019 de la Cour des comptes, au plus tard, fin octobre 2020. Depuis, 2 mois se sont écoulés et rien ne s’est passé. Un manquement qui n’est pas du goût de la Société civile. «On a constaté qu’il y a encore un retard dans la publication des rapports de la Cour des comptes. Alors qu’elle avait promis de publier les derniers rapports en octobre 2020. A ce stade, on n’a absolument encore rien vu. Cela constitue une faiblesse par rapport à la promotion de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption au niveau du Sénégal», peste Birahim Seck du Forum Civil. Pour Guy Marius Sagna, il ne faut pas s’attendre à la publication de ces rapports de sitôt. «Macky Sall a été énergiquement critiqué par les Sénégalais pour avoir fait du deux poids deux mesures, du ‘’Coumba am ndèye et du Coumba amoul ndèye’’, et d’une gestion à géométrie variable des rapports des corps de contrôle. Il est tellement fatigué de mettre ses rapports sous son coude, qu’il a décidé que ces rapports ne sortent plus ou mettent du temps pour sortir. Et cela fait partie de ce qui maintient le Sénégal dans le top 30 des plus pauvres pays au monde», soutient Guy Marius Sagna. Le responsable de Frapp renchérit : «Combattre l’émigration irrégulière, le sous-développement et émerger de la pauvreté, c’est aussi lutter pour la transparence et la redevabilité. D’où la sortie ou la publication régulière des rapports des corps de contrôle et que les résultats soient suivis d’effets. S’il y a des instructions à mener, qu’elles soient menées et s’il y a des sanctions à prendre, qu’elles soient prises, dans le but d’ancrer et d’instaurer solidement la gestion démocratique, transparente, rationnelle et parcimonieuse de nos derniers publics».


IBRAHIMA KANDE

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Publié par

Namory BARRY

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