«Présentement, il est presqu’impossible pour l’Etat de venir en aide à qui que ce soit»

vendredi 15 janvier 2021 • 310 lectures • 1 commentaires

Économie 3 ans Taille

«Présentement, il est presqu’impossible pour l’Etat de venir en aide à qui que ce soit»

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Maillon le plus faible de la chaîne économique, le secteur informel est le plus impacté par les mesures du couvre-feu. Malheureusement, à l’heure actuelle, l’Etat pourrait difficilement l’appuyer.

L’activité économique au Sénégal est portée par le secteur informel, dans lequel on retrouve plus de 97% des entreprises du pays. Mais, ses acteurs sont dans une précarité sans nom et sont les plus touchés par les mesures du couvre-feu, décrété une nouvelle fois le 6 janvier dernier. Horaires réduits, restrictions dans le transport… le secteur informel paie un lourd tribut au couvre-feu. De quoi pousser les autorités étatiques à venir en aide aux acteurs de ce secteur. Mais ce ne sera pas aussi évident, à en croire l’économiste et expert financier Mohamed Dia. «Présentement, il est presqu’impossible pour l’Etat de venir en aide à qui que ce soit, l’Etat risquant même d’avoir besoin d’aide. Nul n’a pensé que cette pandémie allait perdurer. Aucun pays n’était préparé à une telle crise.» Il ajoute que quand un secteur n’est pas formel, il est presque impossible de l’aider, car un recensement exact des acteurs dudit secteur n’a pas été fait et la lenteur pour que ses acteurs reçoivent les fonds est un autre problème pour l’économie. «Si l’Etat n’est pas financièrement en mesure d’envoyer de l’argent aux populations, il n’est presque pas nécessaire d’user d’alternatives, car cela n’aura pas d’impact direct sur l’économie, fait-il savoir. Il faut noter qu’avec la pandémie, le Sénégal est devenu prudent dans sa manière de s’endetter. Pour l’année 2020, on note que 28% du besoin en financements est en DTS (Droit de tirage simple) avec un taux d’intérêt fixe, 21% en Euro avec un taux fixe et 18% semi concessionnel en euro avec un taux variable pour ne citer que ceux-là. Si on peut bénéficier d’un allègement de la dette et qu’on enlève ce taux d’endettement de 70% de la région, on pourra s’endetter davantage pour pouvoir aider les populations financièrement et qu’elles puissent dépenser l’argent dans l’économie. Si l’Etat pouvait respirer un peu et s’endetter, cela allait beaucoup aider l’économie nationale de notre pays.»

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«Eviter que l’impact économique se transforme en impact social»
Toutefois, selon le Directeur du Bureau de prospective économique (Bpe), l’impact est moindre que lors des premières mesures de restrictions prises auparavant. «Il y a eu des effets d’apprentissage, les acteurs du secteur informel qui ont vécu les premières mesures ont appris à gérer dans le cadre des contraintes qui sont posées et à adapter leurs stratégies, notamment les horaires et l’approche par rapport à la clientèle, indique Moubarack Lo. Les clients, eux-mêmes, s’adaptent et donc a priori, il devrait y avoir un impact plus modéré. Mais il faudra évaluer cela dans le cadre des enquêtes de conjoncture menées par le ministère de l’Economie et, à la fin de l’année, voir ce que cela va engendrer sur l’évolution de l’activité.» Mais même s’il est limité, il y aura un impact certain sur le secteur informel, et il faudra éviter qu’il se transforme en impact social. «Donc, il faudra sans doute étudier comment les appuyer pour éviter que la crise économique, même moins forte qu’avant, se transforme en crise sociale et génère une pauvreté plus élevée, signale-t-il. Parce que beaucoup d’acteurs qui évoluent dans le secteur informel vivent avec des revenus non seulement faibles, mais précaires et ne bénéficient pas non plus de protection sociale ni d’assurance.»

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«Pas de raison de s’alarmer»
Mohamed Dia estime pour sa part, qu’en analysant l’étude de la Banque mondiale et l’Ansd, on note que le secteur informel est plus résilient qu’on ne le pense. «Selon cette étude, 2,5% des unités informelles ont fermé définitivement à cause de la pandémie. Selon toujours cette étude, 88,3% des unités informelles étaient opérationnelles et 9,2% avaient arrêté momentanément. La perception étant la chose la plus importante dans une économie, il faut rappeler que la majorité des responsables de ces unités étaient optimistes. Les heures sont souples, donc il n’y aura pas un grand effet sur l’économie, à mon avis. Il faudrait quand même que le Président aide ce secteur, si le couvre-feu risque de durer. Pour que ce secteur reste dynamique, il faut que ceux qui détiennent le pouvoir d’achat puissent continuer à dépenser pour éviter l’impact du couvre-feu.» Selon lui, il n’y a pas de raison de s’alarmer, les horaires étant souples et cela permettra au secteur de mieux s’organiser conséquemment et surtout d’essayer d’avoir une qualification. Moubarack Lô rappelle que l’Etat avait mis en place tout un dispositif d’appui pour les entreprises du secteur formel, mais c’est plus difficile pour le secteur informel qui, par définition, n’est pas formalisé. «Il n’y a pas de papiers, pas de paiement d’impôts, en tous cas sous forme déclarative, la Tva non plus n’est pas payée, explique-t-il. Donc l’Etat est obligé pour la fiscalisation de trouver des formules simples, il faudrait peut-être s’inspirer de ces formules simples pour générer des appuis simples également.»



«Faciliter l’accès à la commande publique»
Suivant l’économiste statisticien, cela pourrait être des facilités, notamment en termes d’accès aux marchés publics, pour ceux qui peuvent fournir des biens et services pour l’Etat (menuiserie, ébénisterie…) avec des formules simples d’appels d’offres ou de commande publique. «Sans écarter la possibilité de faire des transferts financiers, mais là, la contrainte c’est la capacité de l’Etat qui a été fortement éprouvée pendant l’année écoulée par les dépenses publiques imprévues, relève-t-il. Donc est-ce que l’Etat pourra toujours continuer à mobiliser des ressources sous forme de subventions pour les acteurs du secteur informel, sous forme de transferts non remboursables ? Mais la solution la plus rapide c’est peut-être l’accès à la commande publique. En même temps, l’Etat pourrait profiter de cet appui pour pousser les entreprises à devenir formelles, ce serait une contrepartie que l’Etat pourrait exiger pour pouvoir donner son appui.»
ADAMA DIENG

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Publié par

Namory BARRY

admin

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