Probables alliés pour les élections locales : Wade-Sonko, le mariage de déraison

lundi 12 octobre 2020 • 548 lectures • 1 commentaires

Politique 3 ans Taille

Probables alliés pour les élections locales : Wade-Sonko, le mariage de déraison

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Agitée par Toussaint Manga, examinée par la faîtière du parti, selon des sources proches de Me Wade, l’alliance politique entre le Pds et Pastef/Les patriotes serait aujourd’hui en gestation. Mais en attendant l’accouchement ou pas de cette nouvelle coalition, L’Observateur s’est penché sur les probables performances politiques du duo Wade-Sonko.

L’objectif est clair, limpide comme un coin du ciel miré à l’eau de source. Et même si on en ignore les réelles motivations, on est sûr d’une chose : ce n’était pas pour chambarder des camarades de parti. Dans sa volonté, expression fidèle de ses sentiments politiques du moment, Toussaint Manga est monté haut sur son post Facebook pour émettre un avis qui a vite engagé la formation politique du Pape du Sopi, dont il préside l’Union des jeunesses travaillistes libérales. «Le pôle politique qu’il faut créer pour une opposition plus forte, c’est le tandem Pds-Pastef. Cela ne changera rien aux projets de société des deux partis en 2024. Il faut bien me lire», a écrit Toussaint. Un point de vue qui a vite embrasé le réseau social et embrassé l’assentiment de quelques responsables du Parti démocratique sénégalais. Même si la député(e) de la «Diaspora» et responsable libérale, Mame Diarra Fam, a été la première à apposer son «veto», Assane Bâ, Secrétaire national chargé de la mobilisation et de la propagande du Pds, a, lui, béni un éventuel mariage Pds-Pastef. Et au sein de la formation politique dirigée par Me Wade depuis 1974, il se susurre que l’alliance Libéraux-Patriotes vantée par Toussaint Manga, est partie pour avoir la «baraka» du Pape du Sopi. Surtout que, souligne-t-on, pour l’ancien Président Abdoulaye Wade, la seule bataille qui vaille aujourd’hui est la reconquête du pouvoir perdu en mars 2012 contre Macky Sall, son Premier ministre d’alors devenu aujourd’hui, son adversaire politique numéro un.

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«Une coalition Pds-Pastef ne sera pas gagnant-gagnant»

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Mais quelles seraient les forces et faiblesses d’une telle coalition, qualifiée de «contre-nature», entre deux partis politiques à l’idéologie opposée, aux orientations et positions différentes ? Et si jamais il y a alliance Pds-Pastef qui, de l’un remorquerait l’autre ? Ibou Sané, professeur de Sociologie politique à l’Université Gaston-Berger de Saint-Louis (Ugb) : «L’alliance entre le Pds et Pastef ne sera pas gagnant-gagnant. Du point de vue pratique, cette alliance ne peut pas fonctionner. Les partisans de Sonko ont des dents trop longues, alors que les gars du Pds ne vont pas se laisser diriger. Outre, Sonko incarne l’anti système, le Pds est le système le plus abouti. Donc, s’il travaille avec le Pds, il renie ses convictions. S’il fait marche arrière et se rend compte qu’avec le jeu des alliances, il a intérêt à travailler avec le Pds, il perd son temps. Les gens risquent de le sanctionner et de sanctionner en même temps, le Pds.» Mais Dr Moussa Diaw pense le contraire. L’enseignant-chercheur en Sciences politiques à l’Ugb estime même qu’une coalition Pds-Pastef peut porter ses fruits. Aussi bien pour les libéraux que pour les Patriotes. «Pastef est dynamique dans le paysage politique sénégalais. Actuellement, son leader Ousmane Sonko joue son rôle d’opposant et il est le seul qui s’oppose contre la majorité présidentielle. L’avantage de cette alliance, c’est que le Pds a un maillage national. Donc, une coalition entre les deux partis pour les Locales pourrait aider Pastef à se consolider au plan national. Le Pds a une capacité de nuisance politique. Donc, même en agonisant, le parti peut ressurgir en profitant de ce sang neuf politique de Pastef pour s’engager dans la bataille politique», prédit le politologue.


«Sonko serait rattrapé par la realpolitik»


L’alliance Pds-Pastef ne serait pas une grande première au Sénégal. Un pays où les coalitions politiques se nouent au gré des intérêts, faisant fi des orientations et positions idéologiques. La mouvance présidentielle, assemblage de partis de Gauche et de Droite, est en l’exemple le plus achevé. «Dans le jeu politique sénégalais, tout est possible. Pour la majorité par exemple, on ne prend en compte ni l’idéologie ni les orientations et positions politiques. Elle est la gestion d’une pluralité et de plusieurs identités politiques dont des libéraux, des socialistes, des marxistes», dixit Moussa Diaw. Mais pour le cas Pds-Pastef, les observateurs de la scène politique sont unanimes. «Si Sonko noue une alliance électorale avec le Pds, il se renie», disent-ils, en chœur. Le leader des Patriotes, encombrant rival de Macky Sall, porte-drapeau de tous les mécontents et des combats de la Société civile (sortie du FCfa, gestion vertueuse du pétrole et du gaz sénégalais et réduction de la mainmise étrangère sur l’économie formelle), est un homme «antisystème», il «vomit» les partis traditionnels qu’il juge «corrompus» et «antirépublicains». Mais la politique a ses propres réalités. Pour des jeux d’intérêts, l'adversaire d’hier peut être l’allié d’aujourd’hui. Sonko ne serait-il pas rattrapé par la realpolitik sénégalaise ? Moussa Diaw : «Il est vrai que Ousmane Sonko se contredirait en cas d’alliance entre son parti et le Pds. Ayant toujours défendu l’idée d’un renouveau politique, s’il reste dans sa logique, il ne peut faire alliance avec le Pds. Mais si jamais, il y a alliance, il serait rattrapé par la realpolitik. La démarche est machiavélique, parce que pour des finalités politiques, des alliances peuvent se faire au delà des considérations politiques et idéologiques». Cependant, pour le Professeur Ogo Seck, titulaire agrégé des Facultés de Droit et sciences politiques de l’Ugb, «Sonko n’est pas dans la realpolitik. Encore faut-il donner un sens à ce terme qui signifie : «tenir compte de ses forces» mais aussi de ses faiblesses et être réaliste. C’est valable au plan international, mais au plan national. On peut dire que Aminata Mbengue Ndiaye (actuelle présidente du Hcct) fait de la realpolitik. Si la place qu’elle occupe aujourd’hui devait l’être par Khalifa, qui n’a pas été réaliste et donc n’a pas fait de realpolitik. Sonko ne le fait pas vraiment, il essaie par contre de consolider son parti». Même par une alliance électorale avec le Pds qui serait un coup d’essai dangereux pour la survie de son jeune parti. Ibou Sané : «En cas de coalition, Sonko risque d’être noyé et phagocyté par le Pds, qui est en perte de vitesse et complètement démantelé. Il a tout intérêt à partir seul et s’éloigner des partis traditionnels pour conserver son aura. Jusqu’à présent, il incarne l’autre façon de faire la politique. S’il se précipite à entrer dans un système dans le système, il risque lui-même de se faire bouffer par le système. Et à partir de ce moment, il va perdre toute sa crédibilité.» Ou au cas échéant, par l’entremise d’un discours cohérent, Sonko pourra justifier son «mariage» d’avec le Pds. «La logique politique pourrait dépasser ces paradoxes. Au niveau de l’opinion, il faudra pour Ousmane Sonko tenir un autre discours et expliquer la logique d’une alliance avec le Pds», conseille Dr Moussa Diaw. Reste à savoir si l’ancien inspecteur des impôts radié de la Fonction publique va «oser» franchir le Rubicon. 


«La coalition fera mal à Idrissa Seck et à la majorité…»


On est loin des fameuses «audiences de midi» entre Idrissa Seck et Me Abdoulaye Wade, au Palais présidentiel, en 2007, qui avaient dynamité les chances du président de Rewmi à la Présidentielle de la même année. Ces entrevues au su et au vu de tous avaient même précipité la «chute» et enfoncé aux tréfonds abîmes de l’oubli, le principal challenger de Wade, lors de cette échéance électorale. Aujourd’hui, le contexte est bien différent. La réalité autre. Mais, une coalition Pds-Pastef limiterait les chances du patron du Parti Orange, arrivé deuxième avec 20,51% des suffrages, derrière Macky Sall, à la dernière présidentielle de 2019. «Idrissa Seck aura des difficultés, si cette alliance Pds-Pastef se met en place. Depuis quelque temps, il fait des interventions sporadiques et attend d’engranger des ressources et venir amasser la récolte. Cette stratégie n’est pas convenable et ne s’adapte pas à la réalité politique sénégalaise». Le Pr Ogo Seck abonde dans le même sens. Ou presque. «Idrissa Seck a été victime des manipulations de Me Wade, donc son électorat a beaucoup diminué et son alliance même avec Khalifa Sall qui était très populaire à l’époque, s’est aussi montrée  «contre-productive». L’histoire nous renseigne sur ce point que les hommes politiques trop rigoureux finissent mal en politique. En général, ce n’est pas une exigence encore une fois, mais un constat», explique le titulaire agrégé des Facultés de Droit et Sciences politiques à l’Ugb. Quid du pouvoir ? Moussa Diaw : «L’alliance Pds-Pastef peut faire mal à la majorité.» Mais, il y a des conditions, selon le Pr Ogo Seck. «L’alliance  Sonko-Wade aurait pu être un danger pour le pouvoir, si Karim avait été là. Mais à défaut d’un candidat du Pds crédible, cette alliance, du reste, contre-nature, ne saurait être que «contre-productive», sauf surprise de la part de l’électorat sénégalais», prévient-il. Ibou Sané, lui, n’y va pas quatre chemins. Il dit, convaincu : «Cette alliance ne fera trembler ni Idrissa Seck ni le pouvoir. Le Rewmi, le Pds et le Benno Bokk Yakaar sont des partis et coalitions de partis huilés. Ce qui n’est pas encore le cas de Pastef». L’avenir nous dira !


IBRAHIMA KANDE

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Publié par

Namory BARRY

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