Reportage - Ces écoles qui menacent ruine au Sénégal

jeudi 11 novembre 2021 • 778 lectures • 1 commentaires

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Reportage - Ces écoles qui menacent ruine au Sénégal

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Quelques semaines après le démarrage des cours, certaines écoles n'ont toujours pas ouvert leurs portes à Saint-Louis et Thiès. A cause de la vétusté manifeste de ces écoles, les autorités administratives ont tout simplement décidé de les mettre hors service. Là où à Kaolack et Mbour, certains établissements constituent de véritables bombes à retardement. Faute de réhabilitation et de rénovation. Au grand dam des élèves et de leurs parents.

SAINT-LOUIS : Classement au patrimoine mondial, un frein pour la réhabilitation
Au quartier Sud de l'île, dans l’enceinte de l’école Léontine Gracianet, le directeur M. Ndiaye et un groupe de jeunes s'activent dans une salle mal éclairée. Après avoir donné des instructions, il invite à venir le rejoindre dans son bureau. «Cette salle accueille les élèves du Cm2. Vous voyez l'état dans lequel elle se trouve. Cette partie du bâtiment est plus exposée et démontre l'état de vétusté de l'école. Durant l'hivernage, l'eau s'infiltre à travers les failles de la toiture», souffle-t-il. Ici, le décor est alarmant. Des murs lézardés, des couches de peinture qui se sont effritées avec le temps. Pour éviter la catastrophe, l'école a considérablement réduit son effectif. Douze classes pour 320 élèves. Mais l'école n'occupe que dix classes physiques. «Comme vous pouvez le constater, l'école est très vétuste. Heureusement qu'un ancien pensionnaire de l'école nous vient en aide pour colmater ou rafistoler quelques endroits», explique M. Ndiaye. En attendant une hypothétique réhabilitation qui se heurte au statut de l’île. Assane Ndiaye, directeur de l'école : «L'école fait partie du patrimoine mondial et sa réhabilitation demande beaucoup de moyens. Il faudra respecter l'architecture d'origine, les matériaux, etc. Je dirais que c’est presque une mission impossible, car la procédure est complexe. Il y a un mécène qui a toujours manifesté sa volonté de réfectionner l'école mais, il se heurte à un refus de l'administration. Cette dernière évoque toujours le statut de patrimoine mondial de l'île. Il ne peut entamer les travaux sans la déclassification de l'école. En résumé, le fait que l'école en particulier, l'île en général, soit classée patrimoine mondial constitue un frein pour la réhabilitation.» Selon l'Inspection de l'Éducation et de la Formation (IEF), il existe un projet de réhabilitation concernant au moins cinq écoles pour un budget de plus de 500 millions prévu pour 2022.  

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Plus de 1500 élèves redéployés dans d'autres établissements 
Parmi les acteurs concernés par la fermeture des écoles, les écoliers semblent les plus impactés. Ce sont plus de mille cinq cent élèves qui sont répartis dans d’autres établissements. Avec la fermeture des écoles Khayar Mbengue de Sor, Amadou Dougay Clédor et Ndiawar Sarr du Sud, ce sont plus de 1500 élèves à prendre en charge. Pour cela, l'IEF a trouvé comme solution, l'hébergement dans les autres établissements. Et le système de rotation, en plus de travailler le vendredi soir et le samedi, pour compenser le quantum horaire. Une situation que déplore Pape Amadou Mbengue. Pour lui, la fermeture de ces écoles n’est pas sans conséquence pour les élèves comme pour les parents. Premièrement, les élèves n'ont plus un enseignement stable. Deuxièmement, le niveau des élèves baisse. Mais, selon l'IEF, le système d'hébergement reste une solution conjoncturelle afin de permettre aux élèves de poursuivre leur cursus, en attendant que des solutions définitives soient trouvées. Pour garroter définitivement le mal.

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THIES : «Le Cem Coly Diop risque de s’écrouler à tout moment sur les élèves»


Devant l’Inspection académique (IA) de Thiès, des élèves du Cem Amadou Coly Diop sont aux abois. Depuis que l’arrêté du préfet ordonnant la fermeture du Cem Amadou Coly Diop est paru ce 2 novembre 2021, pour défaut de sécurité du bâtiment qui date de l’époque coloniale. Selon l’autorité, le Cem est un risque réel et les enfants sont en danger. «Ce bâtiment qui date de l'époque coloniale devait être fermé depuis longtemps. Ce n'est pas normal d'avoir attendu l'ouverture des classes pour le faire. Le bâtiment ne résiste plus aux intempéries et risque de s’écrouler à tout moment sur les gamins», justifie l’autorité. Cette décision met les élèves et leurs parents dans tous les états. Munis de pancartes, ils ont manifesté leur courroux ce vendredi 29 octobre 2021.
Reçus par l’inspecteur d’académie de Thiès, la délégation des parents et des enseignants du Cem Amadou Coly Diop dont Babacar Dieng porte la parole a rapporté les propositions de l’IA. Qui commence par le redéploiement des élèves dans d’autres écoles, avec les mêmes professeurs.  En tout, 14 salles de classe où seront répartis 906 élèves seront nécessaires. Une solution alternative. En attendant. 


KAOLACK : Guédel Mbodji de Kaolack, une bombe à retardement 
Le délabrement des lieux saute aux yeux. Ici, sur les douze salles de classe de l’école, seules deux sont praticables. M. Diouf est maître en classe de Cm2. «Nous sommes au cœur d’une bombe à retardement», entame-t-il, en se dirigeant vers une salle jouxtant des cantines du marché. Une pièce dont une partie du toit donne vue sur le ciel. «Heureusement pour nous qu’il s’est affaissé durant les grandes vacances. Sinon, le pire allait se produire. Une telle situation n’allait surprendre personne dans la mesure où depuis la création de cette école, en 1895, aucune rénovation n’a été faite», renseigne le maître de Cm2, debout sur les décombres. A un pas de là, une classe de CP donne des frissons. Les murs fissurés et les fenêtres trouées témoignent de la vétusté de la pièce. «Parmi toutes les salles de l’établissement, celle-ci présente plus de risques. D’autant plus que chaque jour, des élèves sont obligés de faire cours dedans. Les autorités compétentes ont été saisies, mais jusqu’à présent, rien n’a été fait. C’est seulement par la grâce de quelques mécènes que les toilettes qui étaient dans le même état, ont pu être réfectionnées», se désole M. Diouf.
A une dizaine de mètres de cet établissement quasiment en ruine, se trouve pourtant le siège de l’inspection d’éducation et de la formation (IEF). Le directeur absent des lieux, son secrétaire général, M. Badji qui n’a pas voulu se prononcer sur le sujet, nous mettra en rapport avec le planificateur de l’IEF. Joint au téléphone, ce dernier renvoie la patate chaude à l’inspection d’académie. «Notre rôle est de constater de telles situations pour les remonter à l’I.A qui, à son tour, va saisir les autorités compétentes. Ce que nous avons fait, non seulement pour l’école Guédel Mbodj mais aussi pour plusieurs autres établissements scolaires de Kaolack», a-t-il expliqué, avant d’inviter les écoles à se rapprocher des bonnes volontés pour la rénovation des écoles en ruines. 



MBOUR -  ECOLE BADARA SARR : «L’année dernière, une toiture s’est effondrée sur des élèves de la classe de CI» 
Malgré son statut de premier établissement scolaire du département de Mbour et le nombre important de cadres et de hautes autorités qu’elle a eu à former, l’Ecole Badara Sarr de Mbour, communément appelée «Ecole 1», est loin de répondre aux normes. D’emblée, le visiteur est choqué par son état de délabrement très avancé qui ne laisse personne indifférent. «Nous sommes confrontés à un véritable problème de locaux. L’école qui a 100 ans cette année, ne dispose que de vieux bâtiments. Alors que cet établissement scolaire a formé beaucoup de cadres Mbourois qui, malheureusement, n’ont jamais rien fait pour le réhabiliter. Ne serait-ce que pour changer le visage hideux de cet établissement qui, même de loin, se distingue par la vétusté de ses bâtiments.  Pourtant, rien que l’année dernière, une toiture s’est effondrée sur des élèves de la classe de CI (Cours d’Initiation). Heureusement que la toiture n’était pas en ciment, sinon le pire allait se produire. L’école produit d’excellents résultats et ceux de l’année passée en sont une parfaite illustration. Mais malheureusement, la réalité est qu’aucune autorité éducative ou compétente n’a voulu nous venir en aide pour résoudre le problème qui reste toujours entier. Les rares salles de classes réfectionnées, dont dispose actuellement l’école, sont réalisées grâce à des partenaires. Sinon, depuis 100 ans, tout reste inchangé», déplore Mme Khary Thioye, la directrice de l’école. Qui n’est pas la seule à s’insurger de cet état de fait. Madara Guéye, le Président du Comité de gestion de l’école (CGE), par ailleurs parent d’élève, n’apprécie guère le mutisme des autorités compétentes qui continuent de faire la sourde oreille face à cette situation qu’il qualifie de délicate. «Rien qu’en voyant l’école, ses toitures et ses salles de classes, l’on sait pertinemment que la situation est catastrophique. Nous avons plusieurs fois alerté, mais hélas les autorités compétentes n’ont toujours rien fait. Et chaque jour, nous croisons les doigts pour qu’un malheur ne se produise pas car, nous sommes tous gagnés par la peur.»


LOUGA : Ecole «Mbanté», un danger pour les 700 apprenants
Des pans de murs fissurés, des toitures trouées, des fenêtres et portes rongées par l’usure, des salles de classe menaçant ruines. Tel est le triste décor de l’école «Marbath» communément appelée «Mbanté». Cet établissement scolaire, construit en 1959, ploie aujourd’hui sous le poids de l’âge et est devenu un véritable danger pour les 700 apprenants et la dizaine d’enseignants qui le fréquentent. Six (6) parmi les 13 salles de classe que compte ce temple du savoir, sont dans un état de délabrement très inquiétant. Outre les murs qui menacent de céder à tout moment, les plafonds des toitures faites en ardoises se détachent de temps à autre. D’ailleurs, pour parer à toute éventualité, les parents d’élèves et l’administration scolaire ont préféré enlever complétement les plafonds «protecteurs». Adama Sall, directeur de l’école «Mbanté» : «L’école n’a jamais connu de réfection. Nous avons adressé des correspondances aux autorités administratives compétentes et à la mairie de Louga, mais le problème reste entier. Aujourd’hui, nous nous débouillons avec les moyens du bord pour procéder à de sommaires réparations. L’école constitue un danger, mais nous ne pouvons pas la fermer». Conscients du danger réel que représentent ces salles classe, les parents d’élèves s’étaient organisés pour les réfectionner. Ils avaient commencé les démarches allant dans ce sens. Malheureusement, avec le décès de Cheikh Lô, l’un des initiateurs du projet, les choses sont à la traîne, au grand dam des 700 élèves qui côtoient au quotidien le danger. 
AMADOU SAMOURA, ABLAYE GADIAGA SARR, FALILOU MBALLO, MARIAMA GUEYE, ABDOU MBODJ

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Publié par

Namory BARRY

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