Vaccination Covid-19 : L’Etat rate la cible et touche la polémique

lundi 1 mars 2021 • 569 lectures • 1 commentaires

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Vaccination Covid-19 : L’Etat rate la cible et touche la polémique

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Alors que des millions de Sénégalais, cibles prioritaires, attendent d’être vaccinés, c’est un défilé incessant d’hommes politiques pour recevoir leur première dose du vaccin chinois Sinopharm que le pays, tout entier, est en train de constater. Une aberration qui fait grincer des dents.

Le refrain berce les hôpitaux. Comme une chanson dédiée au personnel soignant, la consigne a atteint tous les districts sanitaires du Sénégal. De la capitale comme de l’intérieur du pays. Parfois avec insistance. Pour la première phase de la campagne de vaccination contre le covid-19, le ministre de la Santé et de l’action sociale Abdoulaye Diouf Sarr n’a eu de cesse de rappeler que la priorité est donnée aux professionnels de la santé engagés dans la lutte, aux personnes âgées de plus de 60 ans ou vivant avec des comorbidités. Le chef de l’Etat, Macky Sall a, lui-même, en Conseil des ministres, demandé aux autorités médicales de veiller à une transparence et à une rigueur absolue lors de la sélection des cibles prioritaires. Mais le constat est que rien de tout cela n’a été mis en application. D’une stratégie vaccinale clairement définie, le Sénégal est en train de passer en gabegie vaccinale. Les hommes politiques, principalement ceux qui sont au pouvoir, sont curieusement devenus les cibles prioritaires du vaccin. Et il ne serait pas trop de dire que la «bêtise» a aujourd’hui atteint la… majorité. Surtout qu’ailleurs, en Espagne par exemple, le chef d'état-major de l'Armée, le général Miguel Angel Villarroya, a présenté sa démission, le samedi 23 janvier dernier, après avoir été accusé d'avoir pris sa dose très tôt, en utilisant un passe-droit pour se faire vacciner contre le Covid-19. «Dans le but de préserver l'image des forces armées, le général Villarroya a présenté aujourd'hui, sa demande de démission au ministre de la Défense», lit-on dans un communiqué de l’Armée espagnole. Au Sénégal, on ne s’en émeut – politiquement-  guère. Ou presque. 

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C’est devant les caméras de la télévision publique que le chef de l’Etat et son gouvernement ont été vaccinés, jeudi dernier, après le ministre de la Santé et son équipe. Députés, maires, membres du Conseil économique, social et environnemental (Cese)…ont aussi reçu leur première dose de vaccin. Même si pour le chef de l’Etat et le ministre de la Santé, le choix est compréhensible puisque dans ce cas, l’exemple doit venir d’en haut. Mais pour les autres, pour tous les autres, leur vaccination va à l’encontre de la stratégie adoptée par les autorités sanitaires. Il va surtout à l’encontre des principes moraux puisque le  Sénégal ne dispose  -  pour le moment - que de 200.000 doses de vaccins du laboratoire chinois Sinopharm. Or,  rien que pour le diabète, plus de 3% des Sénégalais sont concernés par cette maladie, selon le Professeur Seydou Nourou Diop, diabétologue et ancien directeur du centre de prise en charge des personnes diabétique, Marc Sangaré. Faites le calcul ! Une aberration qui a poussé l’ancien ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, Me Oumar Youm a décliné l’offre du médecin chef de district de lui administrer sa première dose de vaccin. «Pas par méfiance ou par peur du vaccin, car je me suis vacciné toute ma vie. Certaines parties de mon corps en portent les stigmates, mais je pense que le vaccin ne doit pas être une arme idéologique ou diplomatique, encore moins un instrument approfondissant davantage la cassure entre les citoyens, les riches et les pauvres, les élus et les électeurs, les gouvernants et les gouvernés», a expliqué l’avocat et ancien Directeur de cabinet du chef de l’Etat. 

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«Le folklore de campagne de vaccination se déroule à merveille au Sénégal»
Dans le secteur de la santé, des voix se sont aussi levées pour dénoncer ce qu’on pourrait comparer à un «folkore». Etabli à Bordeaux, Dr Mamadou Mansour Diouf, Médecin réanimateur, se désole de la tournure que prend la campagne de vaccination au Sénégal. Sur sa page Facebook, il écrit, amer : «Le folklore de la campagne de vaccination anti Corvidé se déroule à merveille au Sénégal et les cibles prioritaires sont bien identifiées. Après le Ministre de la santé et les médecins bureaucrates du ministère qui n’ont jamais vu à quoi ressemble un malade atteint de Covid (ils font partie du personnel médical de première ligne naturellement), les directeurs des hôpitaux c’est au tour des membres du gouvernement, des «honorables députés», des Conseillers du Cese, du Hcct et du Hcdt, des gouverneurs, préfets, sous-préfets, des conseillers régionaux, départementaux, municipaux,  des maires, adjoints aux maires etc. sans oublier leurs familles et belles-familles naturellement. Les étudiants en médecine qui sont dans les Cte et qui s’occupent des patients Covid au quotidien, les médecins et personnel soignant du pré hospitalier qui embarquent au quotidien les cas de Covid à bord des ambulances, les personnes âgées porteuses de maladies chroniques (surtout les analphabètes qui ne savent pas s’inscrire sur une plateforme en ligne) etc... vont devoir patienter et attendre sagement leur tour, si jamais le reste des vaccins n’est pas offert aux autres pays africains qui en ont plus besoin, bien sûr.» C’est par le même canal que le  médecin-urgentiste Dr Boubacar Signaté, de SOS Médecin a aussi exprimé ses regrets. «Nous avions besoin de quelques exemples : le président de la République, le ministre de la Santé, le Pr Seydi, le Dr Bousso, le Dr Mamadou Ndiaye qui nous demandent tous les matins de nous faire vacciner, c’est largement suffisant comme exemples. Si dans chaque région, chaque département, chaque commune et communauté rurale, les autorités locales et administratives, politiques sanitaires, leurs familles et obligés, sous prétexte de donner l’exemple, en n’étant pas des cibles prioritaires, s’arrogent les premières doses de vaccins, c’est un très mauvais signal pour la campagne. Les cibles prioritaires sont les soignants de première ligne et les personnes âgées de plus de 60 ans avec comorbidités, qui ont trois semaines après la deuxième dose pour être protégées pour être protégées contre les formes sévères de la maladie, celle qui tue. Avez-vous conscience de cela ? Si vous voulez des exemples, prenez-les parmi les cibles prioritaires qui sont dans les localités au moins. Respectez la stratégie de vaccination et protégez les plus vulnérables, c’est ça l’urgence.»


La grosse colère des médecins en spécialisation et des étudiants en médecine
Les frustrations vont crescendo. Le collectif des médecins, pharmaciens et dentistes en spécialisation (COMES) crie toute sa colère. Dans un communiqué, le comité exécutif du Comes parle de discrimination. «Des collègues, médecins en spécialisation (DES), ont naturellement répondu présent à cette campagne qui vise à les protéger ainsi que leurs familles et les usagers qu’ils rencontrent au quotidien dans les structures hospitalières. Notre surprise a été très grande lorsqu’il nous a été rapporté qu’au niveau de certains centres hospitaliers de Dakar se réalisaient des pratiques discriminatoires vis-à-vis des DES, car on leur a opposé un refus catégorique à l’accès au vaccin, alors qu’au même moment, on procédait à la vaccination d’autres agents ou personnel non médical exerçant au sein de ces structures (agents administratifs, techniques, secrétaires entre autres)», lit-on dans le communiqué. Après avoir dénoncé ce qu’ils considèrent comme un manque de respect, ils ont décidé de décréter une cessation de toute activité hospitalière sur toute l’étendue du territoire national pour une durée de 48 heures renouvelables, à compter du mercredi 03 mars en «réponse à l’injustice grandissante dont ses victimes les médecins DES sans statut», mais aussi pour exiger plus de considération à leur égard. Ces médecins en spécialisation ne seront pas seuls dans leur combat. Aussi, les étudiants en médecine dénoncent leur non-inclusion dans les listes prioritaires pour la vaccination contre le covid-19. Les délégués de la faculté de médecine, de pharmacie et d’odontologie ont aussi pointé du doigt l’absence d’initiatives sérieuses pour une prise en charge vaccinale des étudiants en stages hospitaliers très exposés aux pathologies, avant d’annoncer la cession des activités pédagogiques dès aujourd’hui. 
CODOU BADIANE

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Publié par

Namory BARRY

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