Covid-19 - Abandon des gestes barrières : Port de masque, une normalité passée bizarrerie

mercredi 18 novembre 2020 • 212 lectures • 1 commentaires

Société 3 ans Taille

Covid-19 - Abandon des gestes barrières : Port de masque, une normalité passée bizarrerie

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Avec la tendance baissière de la covid-19 notée depuis un certain temps, rares sont les Sénégalais qui s’astreignent au respect des mesures barrières, dont le port du masque, pourtant obligatoire dans les lieux publics. Objet de curiosité, les personnes qui les portent sont même parfois victimes de railleries. Malades, craintifs, ou juste prévoyants, ces «inconditionnels» du masque expliquent leurs raisons. 

A la gare routière de Petersen (Dakar), l’ambiance est celle des jours ordinaires. Le vacarme est indescriptible. Dans ce haut lieu de rassemblement, les klaxons des véhicules se mêlent aux discussions interminables des passagers. Les vendeurs qui tentent d’écouler leurs produits ne sont pas en reste. Dans ce garage, pourtant noir de monde, un constat s’impose. Il est rare d’apercevoir une personne portant un masque de protection contre la maladie du Coronavirus. La majorité des usagers sont à visage découvert. Seul Seyni s’est prémuni de ce «cache-nez». Debout sur son mètre 60, l’homme, la trentaine, confie, fier : «Depuis la survenue de la maladie, le masque fait partie de moi. Je le porte toujours en dehors de chez moi.»  Fourré dans un pantalon Kaki beige, avec une chemise noire à rayures bleues, le jeune commerçant a fait du port du masque une religion. «Il est vrai que nous sommes dans une phase d’accalmie de la Covid-19. Malgré cette tendance baissière, le virus est toujours là. Il ne faut pas oublier de respecter les règles établies en essayant de se protéger, surtout quand nous sommes dans un lieu public», explique Seyni Diop, convaincu. Malgré quelques moqueries de la part de ses amis, Seyni jure qu’il tiendra le coup aussi longtemps que la maladie durera au Sénégal. «Mes amis passent leur temps à me railler. Mais, tant que la maladie sera là, je continuerais à arborer mon masque de protection, nonobstant le fait que certains me taquinent», explique le trentenaire, avant de se perdre dans la foule.

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«Dans la rue, on te jette des regards bizarres»

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Avec la tendance baissière de la maladie à coronavirus notée ces derniers temps au Sénégal, le port de masque, obligatoire dans les lieux publics, est devenu une exception pour beaucoup de personnes. Ceux qui s’y conforment toujours sont comme des objets d’attraction. La norme est devenue une bizarrerie, même si certains s’y soumettent toujours. Idrissa Cissé est dans ce lot. Assis sur une chaise bleue devant un immeuble R+ 3 au populeux quartier de la Médina, il a les yeux rivés sur son journal. Vêtu d’un caftan gris avec des babouches assorties et une écharpe autour du cou, le visage à moitié recouvert par un masque de protection en tissu, le sexagénaire, retraité de l’administration sénégalaise fait partie des «inconditionnels» du masque. «Les Sénégalais ne réalisent pas la gravité de la maladie», soutient Idrissa Cissé, sans ôter la main de son écharpe qui recouvre son masque. «C’est beaucoup plus dangereux, nous l’avons bien vu avec la France et les autres pays occidentaux», poursuit-il, dans son caftan, un bonnet blanc posé sur la tête. Le vieux Idrissa qui ne comprend pas la nouvelle attitude de nombre de Sénégalais, enchaîne : «Au Sénégal, les gens minimisent la situation et n’écoutent pas les consignes, ils ne font pas attention. C’est dommage.» Jambes croisées, les yeux rouges, le retraité confesse porter toujours le masque, parce qu’il se considère comme une personne à risque. «A mon âge, je suis diabétique et tout le monde sait que le coronavirus ne fait pas bon ménage avec le diabète», explique Idrissa. La mine serrée, Idrissa estime que le relâchement noté chez les Sénégalais est dangereux. «La maladie est toujours là. Alors que beaucoup de pays redoutent une deuxième vague, au Sénégal, on se relâche. C’est très dangereux. Il faut que les Sénégalais sachent que la maladie est toujours d’actualité.» Un avis partagé par son voisin. Boubou traditionnel bleu, bonnet posé sur la tête, il a également la moitié du visage couvert par un masque de protection. «Dans la rue, on te jette des regards bizarres. Il y a trop de laisser-aller dans ce pays. Alors que le port du masque est devenu obligatoire dans la majorité des espaces publics, les Sénégalais se sont relâchés. La plupart d’entre eux se sentent invincibles. Ils estiment que la maladie est totalement terminée, alors que tel n’est pas le cas», explique Moussa Thiaw. Qui poursuit : «Il est connu de tous que la sensibilité et la sévérité de l’infection du Covid-19 augmentent avec l’âge. Et, à 70 ans, je suis une personne à risque. Nous sommes optimistes pour la tendance baissière, mais il faut continuer à être vigilant. Certains pays font face à une deuxième vague. Il faut faire attention, car avec l’ouverture des frontières, il y a d’énormes risques.»


«Mes amis me traitent de paranoïaque»


Un peu plus loin, sur l’avenue Blaise Diagne, le constat est le même. Posé devant un arrêt de bus, en compagnie de ses amis, Souleymane, 21 ans, est considéré comme étant l’exception. Dans un groupe d’environ 10 jeunes, il est le seul à porter un masque. Face aux moqueries de ceux-ci, le jeune est totalement insensible. «Mais enlève ton masque, le coronavirus est terminé depuis longtemps. Tout ça, c’est des histoires», lance de manière sarcastique, un de ses amis à son endroit. Mais Souleymane n’en a cure. Ses convictions sont plus ancrées que les piques de ses amis. «Ces remarques n’ont aucun effet sur moi.  Dans la rue ou dans les lieux publics, les gens vous jettent des regards, comme pour dire que vous êtes le seul à mettre le masque devant tout ce monde. Mais, je n’y prête pas attention», lâche fièrement le jeune homme. Le débit haut, il enchaîne : «Je ressens comme tout le monde la chaleur, je sais que ce n'est pas facile de tenir sous un masque, mais c'est le seul moyen pour éviter toute propagation. Je pense que les gens n'ont pas assez conscience de la gravité de ce virus. Il faudrait qu'il touche tout le monde pour les pousser à enfin réagir.» Du haut de son mètre 70, le jeune footballeur, vêtu d’un maillot, casquette bien vissée, se lance dans une longue séance d’explications. «En général, je porte le masque tous les jours, partout où je me rends, que ce soit dans un commerce ou  dans un autre lieu. Mes amis me traitent de paranoïaque, mais j’ai mes raisons. Les personnes asthmatiques ont tendance à être celles qui souffrent d’affections à hauts risques. Et franchement, je ne veux pas être contaminé. Ce masque est important pour soi d'abord et aussi pour le respect des autres.» 


«Tant que le Covid-19 sera là, je continuerais à mettre un masque»


Au Terminus Liberté 5, la circulation est fluide. Sous la chaleur, les riverains essayent tant bien que mal de vaquer à leurs occupations.  A hauteur du rond-point, un agent de circulation, sifflet à la bouche, guide les voitures qui empruntent le carrefour. Ici, on compte le nombre de personnes avec un masque facial. Surpris à l’ombre sous un arbre, devant une file de taxis, Ndeye Awa Diakhaté, munie de deux gros sachets noirs, attend impatiemment un moyen de transport. Coincée dans un habit traditionnel wax bleu, foulard négligemment posé sur la tête, la dame, la quarantaine, recouvre la moitié de son visage avec un masque de protection chirurgical. «Malgré le relâchement noté chez les Sénégalais, je porte mon masque, car j’ai toujours peur de choper le virus», confesse la dame. Une appréhension de la maladie compréhensible, Ndeye Awa confiant avoir un proche atteint de la covid-19. «Franchement, au début, je ne croyais pas trop à l’existence de la maladie. Je pensais juste que c’était une astuce de nos autorités pour avoir de l’argent de la part de l’Organisation mondiale de la santé (Oms). Mais, quand mon frère utérin a contracté le virus, j’ai su que la maladie existe et qu’elle est sérieuse», explique la commerçante. La voix étouffée par son masque de protection, la dame enchaîne difficilement : «Mon frère faisait partie des cas communautaires. Personne ne sait où il a chopé le virus. C’était une situation très difficile pour notre famille. Car, c’est lui qui prenait en charge toute la famille. Il est resté 4 mois en soins car, en plus de la maladie, il était diabétique. Mais, par la grâce de Dieu, il s’en est sorti.» Des moments durs pour Ndeye Awa. «Avoir un proche malade a renforcé mon sentiment sur ces gestes barrières, parce que j'ai conscience de ce qu'on peut subir. C’est le seul moyen que j’ai si je veux me protéger et protéger les membres de ma famille. Donc, contrairement à ce que les autres pensent, ce masque n’est pas une contrainte, mais un outil de protection. Et, je continuerais toujours à le mettre tant que la covid sera là», explique Ndeye Awa, avant de s’engouffrer dans un taxi.


AICHA GOUDIABY (STAGIAIRE)

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Publié par

Namory BARRY

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