Macky-Sonko, le temps de la realpolitik

mercredi 25 novembre 2020 • 216 lectures • 1 commentaires

Politique 3 ans Taille

Macky-Sonko, le temps de la realpolitik

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La nomination d’Idrissa Seck à la tête du Conseil économique, social et environnemental (Cese) a chamboulé tout le paysage politique sénégalais. Une nouvelle reconfiguration a vu le jour, matérialisée dernièrement par ‘’l’entente’’ entre Barthélémy Dias et Me Moussa Diop, sous les bons offices d’Ousmane Sonko. Le leader du Pastef, chantre de l’anti-système, a rencontré hier mardi, le leader du Fsbj, Cheikh Bamba Dièye.

Les images qui ont fait le tour de la toile dans la soirée du lundi ont surpris tout le monde. Le maire de Mermoz Sacré-Cœur, Barthélémy Dias et l’ancien Directeur général de Dakar Dem Dikk, Me Moussa Diop, main dans la main et tout sourire, devant un Ousmane Sonko tout aussi souriant et fier d’avoir réconcilié les deux hommes. Barthélémy Dias et Moussa Diop, après une guerre verbale par presse interposée, faite d’insultes et d’accusations, avaient fini devant le tribunal, suite à une plainte de l’ancien Dg. A la surprise générale, c’est le leader du Pastef qui a réussi à leur faire enterrer la hache de guerre. L’ex responsable de l’Apr a retiré sa plainte, le calumet de la paix fumé. Un acte qui laisse présager une nouvelle entente entre des leaders que tout séparait. Les ennemis d’hier deviennent les amis d’aujourd’hui, au gré des soubresauts de la politique politicienne, et au mépris des idéologies politiques. «On est dans un schéma où les idéologies et appartenances partisanes sont secondaires par rapport aux ambitions politiques des uns et des autres, analyse Momar Thiam, Dr en Communication et marketing politique. On a vu l’entrisme d’Idrissa Seck qui a soulevé des vagues, on a vu aussi des adversaires farouches d’hier se congratuler et sourire, même si ce sont des sourires de façade, devant les appareils photos et caméras. Est-ce du réalisme politique ? Je dirais plutôt que c’est de la politique, dans le sens où on fait taire l’adversité et les divergences, et on se réunit pour former un bloc face à un pouvoir, fut-il un pouvoir qui cherche à diviser l’opposition.»

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Pour le Dr Momar Thiam, ce remaniement qui a fait revenir Idrissa Seck aux affaires, ainsi que des gens comme Oumar Sarr, est du pain béni pour une opposition qui cherchait une identité claire, surtout face aux médias. «Donc c’est de la politique, mais sous le registre de gérer des ambitions, quitte à mettre des adversités aux oubliettes.» Journaliste et analyste politique, Cheikh Yérim Seck rappelle que la realpolitik a toujours été la ligne de conduite des politiciens sénégalais. «Les convictions ont toujours été un épouvantail, mais jamais le moteur de l'action de nos hommes et femmes politiques.»

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«Les règles sont rangées aux oubliettes dans notre manière de faire de la politique»


Selon Dr Momar Thiam, cette reconfiguration politique a permis de clarifier la situation entre pouvoir et opposition. «Sonko arrivé troisième aux élections, ne peut voir dans cette nouvelle configuration qu’une occasion extraordinaire de se repositionner comme étant un leader de l’opposition, qui va se renforcer avec l’apport de Barthélémy Dias ou de Me Moussa Diop qui aujourd’hui, est en froid avec la majorité présidentielle, ou d’autres membres de l’opposition.» Il souligne que certains ont soulevé la question de l’éthique et de la déontologie politiques, mais pour lui, l’éthique et la déontologie politiques ne sont un état de fait qu’à partir du moment où les règles sont bien définies et qu’on ne les enfreint pas. «Mais aujourd’hui, les règles sont rangées aux oubliettes dans notre manière de faire de la politique, donc on ne peut plus se référer à cela, regrette-t-il. Personne ne pouvait parier que Macky Sall allait nommer Idrissa Seck, et compte tenu de l’adversité qu’il y avait entre Barthélémy Dias et Moussa Diop, personne n’aurait parié qu’ils se retrouveraient à se serrer les mains et à passer l’éponge. Donc il faudra se faire à cette nouvelle donne, à cette nouvelle manière de faire de la politique, qui ne nous est peut-être pas propre, mais qui ailleurs, se fait avec un peu plus d’élégance républicaine.» Mais pour l’analyste Mbaye Sidy Mbaye, nous allons vers une realpolitik au Sénégal. «Ce qui veut dire que ceux qui ont réellement l’électorat vont gouverner, et c’est ça la vérité de la politique.»


«Si Sonko débauche des transfuges du pouvoir à la gestion décriée, c'est à désespérer de la relève»


Quid du leader de Pastef, dont les actes commencent à détériorer l’image ? Cheikh Yérim Seck estime que s’il veut conserver sa crédibilité, il doit se garder de reproduire les pratiques de recyclage de rebuts politiques qui valent à la classe politique traditionnelle d'être honnie aux yeux de l'opinion. «Si Sonko, qui se proclame en rupture avec le système, débauche des transfuges du pouvoir à la gestion décriée, c'est à désespérer de la relève. Cela ne va qu'aggraver la crise de confiance qui perdure entre nos compatriotes et la classe politique.» Mais pour Mbaye Sidy Mbaye, il y aurait beaucoup d’images brouillées si on tenait compte de cela. «C’est la politique qui les fait bouger, il y a des appels qui ne sont pas entendus par le public, et les réponses sont plus bruyantes, et souvent plus sollicitées. Au Sénégal, on devient chef de parti du jour au lendemain, mais il faut que les gens fassent carrière dans la politique, qu’ils prennent des coups, cela va faire leur histoire et leur réputation, et on les respectera pour ça, c’est ce qu’on appelle l’engagement politique.» Pour sa part, Dr Momar Thiam estime que c’est à Ousmane Sonko d’avoir la pédagogie explicative nécessaire pour faire la part des choses entre ce qui fait le socle de son programme et de sa politique, et ce qui relève de l’entrisme de certaines personnes qui ont eu à le combattre ou à le décrier. «Je ne pense pas que cette entente Sonko-Barth-Me Moussa Diop puisse porter un coup fatal à son image ou à sa considération politique, c’est à lui d’expliquer qu’en politique, il faut savoir compter, mais pas forcément déduire.» Momar Thiam est d’avis que pour le moment, on ne peut pas dire qu’il y a un gagnant ou un perdant dans cette nouvelle configuration. «Cela va se mesurer à leur capacité d’avoir un message clair vers les Sénégalais, qui va transcender leur adversité d’antan et édifier l’opinion pour qu’elle puisse comprendre et l’intégrer dans son mode de fonctionnement. Et cela ne sera possible que quand il y aura une élection, même s’ils se font battre, on verra que cet assemblage ou cette manière de faire de la politique n’a pas fonctionné.»


ADAMA DIENG

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Publié par

Namory BARRY

admin

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